Dans la nuit suivant la bataille, les deux adversaires dormirent
à quelques pas les uns des autres. Le prince Frédéric-Charles
passa la nuit à Gorze, Bazaine coucha à Gravelotte,
et les soldats à la belle étoile, sur le terrain.
Les Français, qui n'avaient fait preuve que de peu d'esprit
d'initiative, se limitant à défendre leurs positions,
conservaient leurs emplacements de Bruville à Rezonville
(moins Vionville et Flavigny). Les Prussiens qui avaient attaqué
sans relâche toute la journée, étaient harassés,
et à court de munitions. La voie de la retraite sur Châlons-sur-Marne
était toujours ouverte puisque les routes d'Etain et de
Briey demeuraient libres. Celle de Verdun était coupée
à Vionville. Une attaque française le 17 au matin,
par les divisions françaises intactes contre les débris
des corps d'armées cramponnées à Vionville
mais hors d'état de tenter le moindre mouvement, aurait
permis aux gros de l'armée du Rhin d'atteindre les routes
d'Etain et Briey par une marche relativement courte et de continuer
leur retraite sur Châlons-sur-Marne.
Mais le Maréchal Bazaine avait vraisemblablement la ferme
intention de s'enfermer dans Metz. C'est donc sous le prétexte
d'une fausse pénurie de vivres et munitions, qu'il ordonna
d'effectuer un mouvement de repli autour du plateau de Plappeville
et de réorganiser l'armée du Rhin dos à Metz
et face à l'ouest sur un front partant de Rozérieulles
à Sainte Marie aux Chênes. Tous, depuis les généraux
jusqu'aux soldats qui s'attendaient à compléter
en cette journée du 17 leur succès de la veille,
furent frappés de stupeur par la contenance de cet ordre
et c'est de façon résignée qu'ils exécutèrent
cette manuvre dès le matin du 17 août 1870.
Quant aux Allemands, en mauvaise posture, qui prévoyaient
une violente offensive française à l'issue peu rassurante,
ils constatèrent avec joie et étonnement le repli
français. L'armée du Rhin livrait le terrain que
les prussiens s'étaient efforcés de conquérir
au prix de sanglants combats, sans pouvoir y réussir, lors
de la journée du 16. Ils purent donc se mettre en place
à contre front, face à l'est et défendant
la route de paris, devant les troupes françaises. C'est
dans cette configuration illogique que les Allemands allaient
prendre l'initiative d'attaquer lors de la journée du 18
août 1870.